LE RAP : CULTURE ? REVOLTE ?

Publié le par Gilbert Deverines

Le mardi 4 mars 2008, Thomas Sauvadet, chercheur, est venu en Touraine animer un débat sur cette musique qui crée bien des débats et provoque bien des réactions négatives chez les conformistes : LE RAP.

Le rap : Témoin et acteur de quelle jeunesse, de quelle culture, de quelle révolte ?

 

La soirée du 4 mars sur ce thème semble avoir répondu aux interrogations des habitués du Cercle Jacques Decour à propos d’un sujet assez éloigné de leurs centres d’intérêt. On trouvera, à la suite, le schéma de la présentation de Thomas Sauvadet qui répondit avec verve aux questions et nous gratifia en fin de soirée d’un Rap de sa composition. Quatre jeunes de Saint-Pierre-des-Corps étaient présents et l’un d’eux, Kitchao rappeur local nous fit écouter la première partie du CD qu’il venait de produire, le volume 1 de « The underground concept » ; ce CD sera en vente dès le 26 mars, Kitchao en distribua largement aux présents ; il nous expliqua sa démarche, musicale, poétique et non commerciale et souhaita que ce contact avec la Cercle soit maintenu et développé.

 

I – D’où vient le Rap

Des ghettos des USA aux cités françaises, le rap est lié à la jeunesse « de la rue », issue des familles les plus insécurisées des quartiers populaires.

 

II. Les trois thématiques principales du rap

1) D’un côté, le rap incarne la contestation et la critique sociales, en représentant aux yeux des jeunes concernés le seul moyen d’expression politique jugé « authentique », c’est-à-dire sans concession sur la forme et sur le fond (vocabulaire violent voire ordurier, contestation radicale).

Il véhicule un imaginaire révolutionnaire qui dit en gros ceci : un jour, tous les jeunes de toutes les cités s’uniront pour brûler « le système ».

Ainsi les émeutes de novembre 2005 sont en partie le produit de cet imaginaire qui met en scène, à travers le rap, la révolte de toutes les cités.

Il s’agit de détruire le « système », ou du moins de l’affaiblir, mais rarement de proposer une alternative à ce système, d’ailleurs mal identifié.

Il ne s’agit pas d’une véritable révolution dans le sens d’une action collective porteuse d’un projet politique alternatif.

Les classes dominantes sont censées être effrayées par ces démonstrations de force émeutière et adoucir leurs modes de domination.

Une version particulièrement aboutie de cet imaginaire « révolutionnaire » du rap est représentée par l’un des raps de Keny Arkana, car on sent ici la possibilité d’un projet politique alternatif, même naïf et embryonnaire.

Titre « Jeunesse du monde » de Keny Arkana.

 

2) D’un autre côté, le rap véhicule, et adhère à, l’idéologie dominante en assurant la promotion de deux valeurs essentielles de notre société : entreprendre et consommer.

On retrouve cette dimension en particulier dans le « gangsta rap », c’est-à-dire dans le rap du gangster, qui se veut rebelle mais qui révèle en même temps l’ampleur du conformisme propre au monde du rap.

On pourrait parler de « conformisme déviant » , en reprenant l’analyse de la déviance .

La révolte se traduit ici par le fait d’accéder à ce à quoi on n’est pas censé accéder, d’accéder à ce que glorifie la société dominante, à savoir le luxe.

Exemple titre « au bout de mes rêves » de Booba :

Attention : les paroles sur Internet sont souvent erronées.

Appeler au secours n' est pas mon genre, ça va sans dire
J'ai jamais bossé, c’est la chose qui m'a
vue grandir
J'ai toujours osé, posé mes tripes sur la musique
Plutôt crever que taffer à l'usine
La luxure m' aura à l'usure peut être
Mais moi j'veux devenir c'que j'aurais dû être
J'ai jamais su c'qu'étais mon rôle
A part être riche, avoir une piaule à Miami beach

 

3) Parallèlement, le rap relate la conflictualité des rapports sociaux entre jeunes « de rue », le côté mortifère de la « vie de rue », l’absence de grande solidarité même s’il y a suffisamment de solidarité pour que la rue et les copains de la rue puissent apparaître comme une « seconde famille » pendant la période de la jeunesse, ce que nous allons voir maintenant dans la chanson de KENY ARKANA, « la mère des enfants perdus », où nous trouvons à la fois le côté solidaire et familial de la « vie de rue », et en même temps sa critique féroce.

 

 

III. Rap conscient et gangsta rap

La première et la troisième thématiques représentent un style de rap qu’on appelle le « rap conscient », plus ou moins opposé au « gangsta rap », puisqu’il critique le « système » et la façon dont celui-ci mine les solidarités entre dominés, alors que le « gangsta rap » assure la promotion des valeurs de ce « système », notamment celles qui tournent autour du verbe entreprendre (self-made-man, glorification du business et des businessmen) et du verbe consommer (glorification de toutes consommations qualifiées de luxueuses).

Pourquoi le « gangsta rap » rencontre-t-il un certain succès commercial en pénétrant le marché des adolescents des classes moyennes et en se taillant la part du lion dans la jeunesse des classes populaires, en France comme aux Etats-Unis ?

Parce qu’il est en phase avec la société actuelle et donc avec la jeunesse d’aujourd’hui.

Quelles conséquences sur les représentations que se font du rap les gens étrangers à cette culture artistique ? Pour les gens de droite (des sauvages qui nous miment maladroitement) et pour les gens de gauche (des capitalistes sauvages).

Quelles sont les conditions de diffusion du « rap conscient » en lieu et place du « gangsta rap » ?

 

IV. Remarque de conclusion

Nous avons aussi d’autres formes de rap :

Rap commercial et sexy.

Rap festif.

Nous n’avons pas jugé utile de développer l’analyse de ces genres de rap.

Publié dans Actualité

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